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25.1.19

La fab cachée de la Lune

Album et icône de légende

Archéologie graphique. Troisième plus forte vente au monde, l'album Dark side of the moon, sorti en 1973 marqua les esprits autant par sa musique que par sa pochette. Conçu par Storm Thorgeson du studio Hipgnosis elle n'a pas vieilli. Il faut s'imaginer qu'à l'époque, aucune informatique ni matériel numérique n'entraient dans la danse. Point de pixel, de wysiwyg, de souris, encore moins de pdf. Les créations se réalisaient à partir de maquettes. Et pour pouvoir les imprimer il fallait réaliser un document technique intermédiaire - le document d'exécution - qui passait ensuite entre les mains d'un photograveur. C'est lui qui assurait toutes les intégrations, qui réglait la couleur et qui tirait au final les quatre films nécéssaires à l'impression en quadrichromie. Un savoir-faire d'exception et de précision qui fut peu à peu éradiqué par l'arrivée puis la montée en puissance de Photoshop.
En 2003 une exposition à la Cité de la Musique "Pink Floyd interstellar" présenta au public un pêle-mêle de documents et d'objets ayant appartenu au groupe. Un objet bien singulier sortait du lot : le document d'exé de la pochette du Dark Side of the Moon, son squelette en quelque sorte ou plutôt son adn technique. Qu'y figure-t-il ? Un tracé au format, un bout d'illustration et des instructions portées sur un calque. Rien de bien excitant au demeurant.

Le document d'exécution de la pochette avec ses deux plats

Alors faut-il ne voir dans ce fragile filigrane qu'un objet de curiosité, caduc et sans lien avec le présent ? Au prime abord oui, car nul ne peut contester que les logiciels ont définitivement gagné la partie et pris le relai. Nourri à l'intelligence artificielle, Photoshop est aujourd'hui capable en quelques fractions de secondes de produire le plus impressionnant des détourages.

Dans une récente contribution, le philosophe Bernard Stiegler ne s'avoue pas pour autant vaincu. Il dessine une possible voie de reconquête dans le bras-de-fer que se livrent l'homme et la machine. Si le machine-learning et l'intelligence artificielle sont en passe de nous déposséder de tous les savoirs, rien ne nous empêche de nous les réapproprier. Alors sans nostalgie ni attendrissement béas, penchons en conscience sur leur mémoire. Au-delà de sa pochette, Dark side of the Moon reste aussi le fabuleux condensé d'un savoir collectif qui mêla intuition, émotion, intelligence, bidouillages et transpirations en nombre, audaces et explorations en tous genres, exemplaire !

Bonus sur arte.tv et youTube :
- Pink Floyd /The dark side of the moon, (jusqu'au 30/03/19) un documentaire sorti en 2003, qui revient sur la génèse et l'enregistrement de cet album.
- Pink Floyd "P.U.L.S.E" Dark side of the moon, (jusqu'au 10/04/19) captation live de la dernière prestation du groupe le 20 octobre 1994, soit trente ans après sa formation.
- Bernard Stiegler "Éviter l'apocalypse" sur youTube entretien de 55 minutes