12.12.14

Touche pas à la couverture du livre !


Graffiti sur une affiche du métro parisien © vsfg

Noël. Avez-vous remarqué que certains de nos magazines ont pris le parti de ne pas reproduire les couvertures de livres qu’ils recommandent dans leurs suppléments cadeaux pour les fêtes ? Leur mise en page se construit souvent autour de visuels à vocation plus décorative qu’informative. Certains recourent à la main d’un illustrateur, d'autres préfèrent solliciter l’œil d‘un photographe. Mais quelque soit l’option et le talent de ces producteurs d’images, le résultat est le même : une liste de références commentées. Elle se déroule sous nos yeux, bien en mal de se figurer les ouvrages dont il est fait mention. Pas la peine de faire un micro-trottoir ou de tweeter la question de savoir s’il est possible d’acheter un livre sans en apprécier la couleur, le format, l’épaisseur, le visuel ou la typographie de sa couverture… la réponse est sans appel. Le livre n’est pas réductible à son seul contenu ou à son auteur. N’existe-t-il pas d’abord par l’objet qu’il devient une fois imprimé et relié ? Ne l’achetez-vous pas en partie pour sa robe, son parfum, sa main et l’émotion qu’il vous délivre à son contact ?
Certes la publication en cette fin d'année de ces listes est utile mais elle prive dans cet état les lecteurs d’un réel service. Quand on connaît la petite cuisine interne et la mauvaise passe dans laquelle se trouve la presse papier, on pourra révéler que cette pratique n’est pas le fruit du hasard ni du caprice d’un directeur artistique paresseux, elle s’inscrit plutôt dans une logique de productivité qui cherche à faire gagner du temps et de la place aux équipes de réalisation de vos journaux autant sur la recherche des visuels de couvertures longue et fastidieuse que sur leurs mises en page qui demandent mine de rien de multiples réglages et ajustements…
Piètres excuses, me direz-vous avec raison. Peut-on s’imaginer un seul instant être plongé dans une librairie dans un noir à 100 %, sans avoir des sueurs froides ? On insistera jamais assez sur l’importance des couvertures de livre. Joyeuses fêtes et bonnes lectures !
 
A découvrir : La féerie des mille et un livres d’Irma Boom
A relire : La laideur se vend mal de Raymond Lœwy, collection Tel (n°165)
Editions Gallimard


15.8.11

Ne bronzez pas idiot • 5e semaine

1 - Conduite accompagnée (suggestion de la semaine par Di Marco). Après avoir remis les 4 parties de l'image dans le bon ordre, délit de fuite ou assistance à personne en danger le choix vous appartient, racontez-le dans un commentaire d'une quinzaine lignes (dessin le cas échéant accepté, best of de vos contributions à la fin de l'été).

2 - Brush up your english with the Rob Pruitt 101 Art Ideas to do list
[91 to 101] :

[…]
81 - Take things apart.
82 - Put things back together.
83 -Toss losse change into a pile on the floor.
84 - Make an aluminium foil death mask.
85 - An electric fan wearing a T-shirt becomes an easy figurative sculpture.
86 - Make a portrait of someone by printing their phone number poster size.
87 - Make a portrait/self-portrait by captioning a mirror.
88 - Frame a crédit card statement, e.g., the month of your trip to Paris.
89 - Stalk someone.
90 - Collect autographs, one per canvas or page. Think of them as portraits.
91 - Make a photo album of all your wordly possessions.
92 - Record yourself talking for fifteen minutes, let your consciousness stream.
93 - Save and transcribe your voicemail. Publish your emails.
94 - Make a collage on an unopened wine bottle for the year of its vintage.
95 - Don’t clean your house and call it squatter art.
96 - Make a scent installation. A pipe branch in a microwave, pour a glass of cologne, fart.
97 - Write captions on the glass for the view outside your window.
98 - Write lyrics to a classical music composition.
99 - Title untitled paintings.
100 - Make a list
101 - Title your life.

Rob Pruitt, 1999, All Rights Reserved.
That's all folks !

3 - L'anagramme de la semaine : Lorgna o Elysée
(indice : primaires) par Clovis Ferdeus. Réponse le 22-08.
Solution de la semaine précédente : "A la recherche du temps perdu"
extrait de Mementos-fragments, de Michèle
Grangaud, éditions POL. 
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Réponse : Ségolène Royal ! (Bonne fin de vacances)...

8.8.11

Ne bronzez pas idiot • 4e semaine

1 - Protection de la nature (suggestion de la semaine par Di Marco). Après avoir remis les 4 parties de l'image dans le bon sens, vous disposez de quelques jours pour vous débarrasser de l'animal que vous venez de recueillir et raconter dans un commentaire d'une quinzaine lignes votre bonne action (dessins le cas échéant acceptés, best of de vos contributions à la fin de l'été).

2 - Brush up your english with the Rob Pruitt 101 Art Ideas to do list :
[61 to 80]

[…]
61 - Frame a painting with a feather boa.
62 - Hang a painting crooked, upside down, or face to the wall.
63 - Go on an urban animal photo safari. Pigeons, rats, squirrels, cockroaches.
64 - Paparazzi your pet.
65 - Interior decorate your pet’s habitat.
66 - Make a valuable sculpture by adding a diamond.
67 - Put things on pedestals.
68 - Take things off pedestals.
69 -Two identical things side by side.
70 - Ten identical things in a row.
71 - Something cut in half.
72 - Put googly eyes on things.
73 - Draw faces on Styrofoam wig heads, light bulbs and eggs.
74 - Point a treadmill at painting.
75 - Name all of the bricks that make up a wall.
76 - Make up drag queen names. Amber Alert, Whitney Biennial.
77 - Make up band names.
78 - Name your plants.
79 - Name household pests. Bugs, mice.
80 - Invent a new color and name it.

[…] Following items next week.

3 - L'anagramme de la semaine : m'écharpe l'écharde du stupre
(indice : asthme). Réponse le 15-08. Extrait de Mementos-fragments,
de Michèle Grangaud, éditions POL. 
Solution de la semaine précédente : "Rien ne boite, Lacan"

1.8.11

Ne bronzez pas idiot • 3e semaine

1 - Natation (suggestion de la semaine par Di Marco). Après avoir remis les 4 parties de l'image dans le bon ordre, faites vos jeux, crime ou châtiment, vous disposez de quelques jours pour apprendre à nager et raconter dans un commentaire d'une quinzaine lignes votre exploit ou votre naufrage, au choix (dessin le cas échéant accepté, best of de vos contributions à la fin de l'été).


2 - Brush up your english with the Rob Pruitt 101 Art Ideas to do list
[41 to 60] :

[…]
41 - Curate a Netflix or Youtube festival.
42 - Make a mix tape.
43 - Take audio snapshots with a digital recorder.
44 - Arrange flowers in unexpected combinations. Cattails & dogwood, baby’s breath & spring onions.
45 - Make a monochrome meal.
46 - Dress in monochrome.
47 - Live in monochromatic house.
48 - Be a photographer without a camera. Download images from internet.
49 - Buy something expensive, put it on a pedestal, return it for your money back.
50 - Make mud. Two parts dirt, one part water. Use as paint or clay.
51 - Make a leaf out of paper and tape it to a tree.
52 - Make a tree and add it to a forest.
53 - Pour a glass of water to look at.
54 - Draw yourself into your favorite comics trip.
55 - Put everything inside outside.
56 - Bring everything outside inside.
57 - Fill a desk drawer with gravel and make a secret zen garden.
58 - Make a drawing by holding  a marker in a place other than your hand, wherever you can. Toes, mouth, underarm, butt cheeks.
59 - Make a drawing by highlighting as you read.
60 - Translate from one language to another.

[…] Following items next week.

3 - L'anagramme de la semaine : La boîte cranienne
(indice : maître du divan). Réponse le 8-08. Extrait de Mementos-fragments,
de Michèle Grangaud, éditions POL. 
Solution de la semaine précédente : "Le cimetière du Père Lachaise"

25.7.11

Ne bronzez pas idiot • 2e semaine


1 - Jeux de rôle (suggestion de la semaine par Di Marco). Après avoir remis les 4 parties de l'image dans le bon ordre, vous disposez de quelques jours pour rééditer (fictivement) ce fait divers et raconter dans un commentaire d'une quinzaine lignes votre version, (dessin le cas échéant accepté, best of de vos contributions à la fin de l'été).

2 - Brush up your english with the Rob Pruitt 101 Art Ideas to do list 
[21 to 40] : 

21 - Vandalize your home with spray paint.
22 - Graffiti your bathroom.
23 - Use a magazine as a sketchbook.
24 - Spread rumors.
25 - Draw something Small, scan it, print it out big.
26 - Turn your TV upside down.
27 - Turn your TV on its side, to watch while lying on your side.
28 - Watch your tv witout sound, or listen to TV with the screen covered.
29 - Watch a DVD in fast motion, slow motion, or reverse.
30 - Make a drawing by pressing pause and tracing the image off the TV screen.
31 - Spend a day in cotume.
32 - Sit on the toilets backwards.
33 - Make a sound composition when you pee by alternating the flow between the porcelain and the water.
34 - Do an interpretative to environnemental sound. Car alarm, baby crying, clock ticking.
35 - Wear diapers.
36 - Sprinkle glitter.
37 - Take drugs.
38 - Shoplift.
39 - Sneak your own merchandise into stores.
40 - Collect stuff.

[…] Following items next week

3 - L'anagramme de la semaine : Ici la chimère est perlée d'eau
(indice : Jim Morrison). Réponse le 1-08. Extrait de Mementos-fragments,
de Michèle Grangaud, éditions POL. 
Solution de la semaine précédente : "Touche pas à mon pote"

18.7.11

Ne bronzez pas idiot • 1ere semaine

1 - Encombrant (suggestion de la semaine par Di Marco). Après avoir remis les 4 parties de l'image dans le bon ordre, vous disposez de quelques jours pour construire votre célébrité et raconter comment vous manier la pelle en enregistrant un commentaire d'une quinzaine lignes (dessin le cas échéant accepté, best of de vos contributions à la fin de l'été).

2 - Brush up your english with the Rob Pruitt 101 Art Ideas to do list :

1 - Tell the truth.
2 - Tell a lie
3 - Change your name
4 - Make someone happy.
5 - Make someone cry
6 - Fake laugh.
7 - Fake an orgasm.
8 - Fake your death.
9 - Get plastic surgery
10 - Put make-up on body parts. Ear shadow, belly blush.
11 - Put make-up on your face.
12 - Make a painting with make-up.
13 - Stay in bed.
14 - Draw on your bed sheets.
15 - Make a baby.
16 - Kill yourself.
17 - Sell a collector a key to your house.
18 - Customize your refrigerator with paint, decals, and locate in a place other than your kitchen.
19 - Customize Storage boxes and display as sculpture.
20 - Make a painting on a lampshade.

[…] Following items next week

3 - L'anagramme de la semaine : Ta moto nous échappe 
(indice : fêté le 14 juillet au Champ de Mars à Paris)
Réponse le 25-07. Extrait de Mementos-fragments,
de Michèle Grangaud, éditions POL. 

17.5.11

Dépucelage typographique


Vide-grenier. A la journée des Puces typographiques, je me suis rendu le samedi 7 mai dans la jolie ville de Bagnolet. J'y ai posé sur une petite table carrée, toute une série d'ouvrages qui ont accompagné, nourri jusqu'à la satiété mon œil de graphiste. Il était temps qu'ils inspirent de nouveaux regards, qu'ils soient à nouveau feuilletés, caressés puis dépouillés de leur contenu. A l'intérieur, ne vous y trompez pas, principalement des histoires de lettres, d'alphabets, de jeux de mots ou d'images, de proportions et de couleurs, de questionnements ou d'interrogations sur l'architecture des signes, l'art du livre et le sens de la communication visuelle. Autour de moi, deux éditeurs (B42 et les éditions des cendres), des créateurs de polices, de tampons, et d'objets graphiques allant du livre d'artiste à la sérigraphie. Mon petit commerce d'un jour ne s'en portant pas plus mal, une bonne de partie des livres que j'avais amenés trouvèrent un acquéreur. Parmi les recalés, un livre inattendu de Jacques Laccarière, Ce bel aujourd'hui datant de 1989 qui au demeurant n'avait aucun lien avec nos affaires typographiques puisqu'il y faisait sous la forme de morceaux choisis, l'éloge de son époque. Quoique, en y regardant de plus près...
A la page 11, tout d'abord une réflexion liminaire qui plante le décor : […] Apprendre à vivre avec son siècle : existe-t-il un livre, un manuel, un bréviaire susceptible de l'enseigner, et d'ailleurs est-ce vraiment enseignable ? Je me demande pourquoi tant de personnes autour de moi vivent dans la hantise de n'être pas assez modernes, perdant ainsi toute chance de l'être un peu. Car la modernité c'est exactement le contraire de la mode, malgré la ressemblance de ces deux mots. Etre moderne, c'est respirer au rythme de son temps et non s'essouffler à le suivre, c'est nager, sans jamais se laisser emporter par les courants dont il vous baigne. […]

Le typographe, un alphabet révolutionnaire évolutif, présenté par Julien Priez

Un peu plus loin à la page 21, un chapitre intitulé A Z E R T Y I O P tout entier consacré à une bien curieuse affaire, celle de l'ordre des lettres, dont il a été déjà ici question (voir la liste des mots-clés). Notre homme en effet découvrit l'alphabet avec la secrétaire de son père, qui a ses moments perdus lui apprit les 26 postures en égrenant les touches du clavier de sa machine à écrire. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il intégra l'école, d'entendre la maitresse lui assener une toute autre chanson. […] L'abécédaire commençait par A B C D E F G et se continuait par H I J K L M N O… L'institutrice était-elle folle ? Où avait-elle trouvé cette ordre absurde ?  Je le connaissais bien moi, l'ordre véritable des lettres. Je l'avais appris sur les genoux de la dactylographe quand elle guidait mon doigt sur la machine. […] Le véritable alphabet ne commence pas du tout par A B C D E F G mais bien sûr par A Z E R T Y I O P ! […]  Pour conclure l'anecdote, l'auteur finit par trois petites questions en guise de contrepoint, façon Lagarde & Michard. Celle qui nous intéresse ici porte sur la phrase mystérieuse que tapaient les réparateurs pour s'assurer que toutes les touches d'une machine à écrire fonctionnaient correctement. Elle fut également largement reproduite par les photocompositeurs, dans leur catalogue de spécimen de caractères, puis par les diffuseurs de fontes qui affichent aujourd'hui sur le net la phrase recherchée : "Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume". Ce pangramme (du grec pan : « tous » et gramma : « lettre ») phrase qui inclue toute les lettres de l'alphabet, longtemps abusivement attribué à Georges Perec grand expert en la matière, fut consacré par le système d'exploitation Windows dans une version XXL : "Servez à ce monsieur, le vieux petit juge blond assis au fond, une bière hollandaise et des kiwis, parce qu'il y tient." Sa version courte initiale, formée de deux hémistiches de six syllabes formait un alexandrin du bel effet qui avait en outre la particularité d'être hétéroconsonnantique (chaque consonne n'y était utilisée qu'une seule fois). Beaucoup se sont essayés à l'exercice avec des résultats la plupart du temps farfelus, comme par exemple cette variante "Le moujik équipé de faux breitschwanz voyage". Avis aux amateurs, sa consommation n'est soumise à aucune modération.

Liens : Les puces typographiques organisées par les Rencontres internationales de Lure ; Le détail en typographie aux éditions B42  ; Papiers dominotés à commander aux éditions des Cendres editionsdescendres@gmail.com ; le typographe Julien Priez  ; et ne l'oublions pas pour finir, l'homme par qui le scandale arriva Jacques Laccarière

3.5.11

La loi du marché


Timbré. Quand j’étais gamin, j’ai collectionné des timbres. Manque de chance, le Yalta philatélique avait déjà eu lieu bien avant ma naissance. Mes trois frères ainés s’étaient partagés le monde et chacun d'entre eux disposait d’un tiers du gâteau qu’il assemblait dans un grand album cartonné, bien gardé. Lorsqu’à mon tour, je me suis pris au jeu, il ne restait que des miettes, de lointaines colonies australes et des doublons. Alors je me suis calé sur le modèle de l’ainé, qui gérait dans son escarcelle, la France, la Suisse (qui avait l’étrangeté de porter les couleurs de l’Helvetia), l’Egypte et je ne sais plus quels autres territoires. Au commencement, la seule contemplation de ces petits morceaux d’images suffisait à mon bonheur, indépendamment de leur valeur faciale et de leur état. Peu à peu, je me suis rendu compte que la plupart des timbres récents supportent la marque de leur propre bannissement. A partir du moment où ils sont oblitérés, ils perdent l’essentiel de leur valeur commerciale. Autre impératif, ils doivent avoir comme tout bon esclave, toutes leurs dents, sans aucune pliure ni coin abimé. Cette dure loi du marché n’avait aucun sens pour l’enfant inexpérimenté que j’étais alors. En quoi un timbre neuf qui de fait, n’a pas voyagé, ni peut-être traversé des océans, pouvait-il prendre l’avenant sur son alter égo tamponné ? Cet infamant stigmate lui donnait au contraire à mes yeux une aura bien supérieure. Comme les visas et les tampons des douanes sur un passeport, l’oblitération m’apportait la preuve tangible de son trajet et attestait la date de son départ.

Centenaire de l'école Estienne (1989) - Valeur faciale : 2.20 francs
Ma déconvenue fut totale lorsque je franchis l’échoppe d’un marchand, pour acquérir un timbre qu’il me manquait dans une série d’animaux produite par les postes suisses. Il n’était pas possible de l’acheter séparément. Seule la série complète était promise à la vente et à un prix bien plus conséquent. La vénalité des choses me détourna de ce commerce sans toutefois m’en éloigner totalement. Ces petits bouts d'images opiniâtres venaient périodiquement frapper sous notre porte. Lorsqu'un nouvel arrivant se présentait, il était précieusement déchiré de l'enveloppe puis décollé de son support en l'exposant à de la vapeur d'eau chaude. Et si d'aventure il résistait un trempage intégral devenait indispensable.
A l'époque je n'imaginais pas qu'un jour le timbre deviendrait autocollant, qu'il pourrait se personnaliser à la demande et que malgré tous les artifices et les gadgets de la modernité (comme par exemple ces timbres à semer avec des graines encapsulées sous pastilles biodégradables que la Poste a édité en février dernier) il sera condamné à disparaître, victime d'avatars numériques redoutables, comme l'arobase et le mms. Quelques-un d'entre nous le regretteront. Revient à ma mémoire ce beau chant d'amour qu'écrivit à son propos le peintre autrichien Hundertwasser disparu en 2000 : […] Le timbre est la seule œuvre d'art que tout le monde peut posséder. Jeunes et vieux, riches et pauvres, bien portants et malades, savants et ignorants, hommes libres et privés de liberté, ce précieux morceau d'art atteint tout le monde en tant que cadeau venu de loin. Le timbre rend témoignage de la culture, de la beauté et du génie créateur de l'homme. […]

Bonus : Personnaliser ses timbres http://montimbramoi.laposte.fr ;
découvrir Hunderwasser http://www.kunsthauswien.com/en/home
ou l'Ecole supérieure des arts et industries graphiques alias Ecole Estienne  http://fr.wikipedia.org/wiki/École_Estienne

27.4.11

Poison d'avril


Compte à rebours. Il ne vous reste plus qu'une petite poignée de semaines pour vous rendre au Musée des Arts décoratifs à Paris avant le 22 mai et y voir une exposition exemplaire, celle de l'affichiste polonais Michal Batory réfugié en France depuis 1994. A son arrivée, il eut le bon goût de proposer ses talents à Jorge Lavelli, directeur du Théâtre de la Colline qui lui fit confiance. Puis se sont enchaînés des collaborations avec l'Ircam, le Théâtre de Chaillot et le Centre de Arts d'Enghiens-les-Bains. Récemment il fit une incursion inattendue dans l'édition et produisit à la l'initiative culottée du directeur artistique de Flammarion, une série de couvertures de livre pour les collections J'ai Lu et Librio. Son crédo, largement développé dans un portfolio publié dans le cahier Lemag de Libération du week-end du 15 et 16 janvier, se résume à ces trois mots : "Que dire et comment". Mais laissons-le s'expliquer : [...] "Aujourd'hui on ne sait plus ce qu'est une bonne image. [...] Une mauvaise image est celle qui dit femme et montre une femme qui dit pierre et montre une pierre, qui privilégie des informations commerciales au lieu de créer des énigmes. Une mauvaise image, c'est une image qui ne fait pas réfléchir et qu'on oublie en deux secondes. Les bonnes sont celles qui restent dans la tête. [...] "


Si Batory ne se prive pas des nouveaux outils, en particulier de Photoshop pour réaliser certains montages, il revendique avant tout sa qualité d'artisan, de travailleur manuel, pourrait-on même dire. La première étape passe toujours par une feuille de papier et plusieurs traits de crayon. Ensuite il fabrique la matière première de ces affiches, des objets-chimères parfois à base végétaux, qui vont produire l'effet de sens et l'envoutement du spectateur. La visite commence par la reconstitution grandeur nature de son atelier, caverne d'Ali-Baba et cabinet de curiosités tout à la fois. Dans des petites vitrines conçues spécialement pour l'occasion sont portés à notre regard tous ces objets, ceux qu'il a détournés, manipulés, photographiés puis intégrés dans ces affiches, celles qu'il présente dans les salles suivantes. L'espace dédié aux expositions temporaires, il faut aller le chercher dans les étages du musée, il s'y déploie dans un grand appartement débarrassé de tout mobilier et de toute décoration, à l'exception de boiseries et de cheminées. Le mariage y est tonique. Les retardataires et tous ceux qui n'auront pas pu faire le déplacement se consoleront se rendant sur son site internet. Y figure à la rubrique actualités un petit film de l'expo.

Lien : http://www.michalbatory.com

20.4.11

L'arobase et le Carambar

Antistress. Tout le monde ne dispose pas des émoluments d'un Jean-Claude Delarue pour s'envoyer une ligne de coke dans les narines quand la pression monte. Plus modestement dans certains "openspace" où se fabriquent des journaux et des magazines apparaissent les jours de bouclage des paquets de bonbons et des boîtes de confiserie en accès libre. Beaucoup y trouvent leur compte, ça mâchouille et ça vous gave de sucre tout à la fois. De surcroit ça pourrait vous faire sourire, voire vous rendre plus intelligent. Deux conditions tout à fait triviales sont toutefois nécessaires à cette dernière éventualité : disposer de Carambars plus d'une dentition à toute épreuve. Ces barres de caramel à mâcher apparues dans les années cinquante appartiennent dorénavant à notre patrimoine gustatif et culturel. Elles doivent leur succès à leur goût, au design de leur papier d'emballage que ne renierait pas un Raymond Loewy, rappelez-vous une grosse typo rouge posée sur fond jaune avec des rayures rouges et blanches nouées en papillote aux deux extrémités, et last but not least imprimée au verso une devinette, une blague, ou encore une charade, au petit bonheur la chance.

Test grandeur nature. "Qu'appelle-t-on en Suède un oreille d'éléphant ?" La solution inscrite en petits caractères rouges à l'envers donne l'arobase comme réponse à cette question. L'arobase ?  Naturellement c'est un peu courtCar saviez-vous que ce glyphe devenu l'icone des millions d'utilisateurs de l'e-mail fut choisi en 1972 par un obscur ingénieur d'une société informatique américaine qui cherchait un caractère séparateur qui ne puisse pas se confondre avec l'orthographe des noms. Le clavier de sa machine à écrire disposait d'un ovni graphique, l'@, utilsé par les comptables de l'époque pour exprimer un prix unitaire. Sans état d'âme il porta son choix sur ce glyphe, ignorant qu'il lui ouvrait la porte d'une notoriété retrouvée. Inventé par les moines copistes du Moyen Age pour abréger le préfixe latin "ad", cette vieillerie n'a pas fini de faire parler d'elle. Paola Antonelli, conservatrice du département d'architecture et de design du Muséum of modern art of New-York (Moma) annonça le 22 mars 2010 qu'elle avait inscrit l'arobase dans les collections permanentes du musée : "Nous n'avons pas acquis le symbole graphique de l'arobase mais sa présence virtuelle, son ombre comme l'ombre d'un papillon. Je n'ai pas besoin de tuer le papillon pour acquérir son ombre". Convaincue de la dématérialisation des supports, elle ajoute sans sourciller : "l'arobase est l'exemple fulgurant et magnifique de ce que le graphisme devrait être de nos jours. [...] Il devient un outil de visualisation de données complexes dont la fonction est d'aider les gens à comprendre, à gérer et à étudier des masses d'informations." La messe est dite. Heureusement qu'il nous restera nos vieux papiers de Carambar. Le façonnage en nombre de ces papiers de bonbon produit parfois des décalages qui font apparaître la réponse à une invisible question précédente. La queue du singe... Cela ne vous pas dit-il quelque chose ?

En savoir plus : Ray Tomlinson celui par qui toute cette affaire commença http://fr.wikipedia.org/wiki/Ray_Tomlinson
Raymond Loewy http://fr.wikipedia.org/wiki/Raymond_Loewy ;
La saga des Carambars http://fr.wikipedia.org/wiki/Carambar
Paola Antotonelli et son musée imaginaire par Véronique Vienne,
Etapes n°189, fév. 2011 ;